mercredi 28 février 2007

Le Lecteur de Sherlock Holmes. Première Partie. Chapitre I.

- Mon cher Watson! Enfin vous voilà. Dites-moi vite, avez-vous fait bon voyage ?

- Le départ d'Angleterre a été, certes, mouvementé. Je ne m'attendais guère à cette précipitation...

- Ah! Mon ami, les circonstances l'exigent. Asseyez-vous, prenez ce confortable siège. Laissez-moi vous servir une tasse de thé.

- Notre logeuse viendra-t-elle...?

- Il ne faut plus songer à Madame Hudson. Ici, son vigilant potentat ne s'exerce pas. Nous sommes enclâvés dans une zone qui n'est plus le royaume domestique de Baker street.

- Dieu du ciel, où sommes-nous Holmes ?

- Au nord de la France, dans l'hôtel particulier d'une ville de province. A dire vrai, le cas est moins facile qu'il n'y parait. Notre localisation réelle est un mystère. Quant à notre nouvel hôte, son visage plein, rond et avenant parle en sa faveur. Je connais bien notre logeur. Il est fort sympathique. Nos échanges ont considérablement amélioré la qualité de mon français. Mister Olivier l'assure : quoiqu'un peu surannée, la syntaxe dont j'ai l'usage, est juste; mon phrasé est correct.

Holmes prend un livre sur une étagère et le présente à Watson, c'est le premier tome du Prélude de Wordsworth

Cet homme charmant veille à ce que la poésie nous précède.
Spenser, Shakespeare, Milton, seront toujours à portée de notre main.

En dépit des efforts qu'il fait, visiblement, pour se mettre en accord avec les chaleureux propos de Holmes, une expression de désarroi ne quitte pas le visage de Watson.

Mon cher ami, n'essayez pas de masquer les linéaments de votre pensée. La dissimulation de ce qui affecte l'âme réclame un talent que votre bienveillance vous refuse. Les hiéroglyphes de l'émotion se déchiffrent à même la chair. Ils n'échappent pas à ma vigilance. Le léger froissement des paupières, les commissures des lèvres, trop artificiellement levées, le moindre de vos mouvements, trahissent votre vie intérieure. Je vois bien que votre nervosité est tendue vers le passé, vers les êtres et les lieux que vous chérissiez. Je vous comprend. Moi aussi, j'ai erré sur la route nocturne...

Face à la tristesse de Watson, Holmes éprouve le besoin de faire des phrases. Il semble savoir précisément ce qui se joue en son ami.

Je vous donne ce conseil : dès maintenant, oubliez le décorum d'autrefois. Prenez vos quartiers dans cette nouvelle maison. Savez-vous que la cordialité française n'a pas disparue ? Les premiers jours qui ont suivis mon arrivée, ce constat fit ma surprise et ma joie. En ces murs, règne une profonde amitié. Allons John, consolez-vous. La France a du bon, vous verrez...

- Est-ce la langue française qui vous fait tant parler ? Qu'est devenu l'anglais de notre enfance ? Qui sommes-nous, Holmes ? Que faisons-nous ici ?

- Ne m'en veuillez-pas de ce que je vais dire. Mieux vaut tout de suite vous détromper. C'est en vain que votre attention s'envole dans la direction des souvenirs. Vous tentez d'emprunter une voie qui n'existe pas.

Holmes marque un temps.

Les anglais ont accueilli fraternellement notre duo. Ma force analytique et votre indispensable fidélité ont remporté une large audience. Vous et moi, sommes devenus les héros populaires du XXèmes siècle. Cependant... nos convictions, nos comportements, nos affections ont été décidé par...

- Mais enfin! Que voulez-vous dire ?

- Vous ne me laissez pas le choix. Nous sommes des personnages de fiction, Watson. Pas des vrais gens. Vous n'avez jamais vraiment vécu, ni réellement relaté aucune des aventures que vous pensiez vivre auprès de moi. Vous avez été le dupe d'un écrivain. Il vous a façonné à son image puis s'est glissé en vous. Sans vous le dire, il vous a fabriqué une vie très vraisemblable, où vous aviez épouse et amis, adresse et profession. L'action à laquelle vous pensiez participer, il l'a implanté dans le quotidien londonien, avec une telle vraisemblance, que vous avez cru réellement rejoindre la vie ordinaire de millions de lecteurs. Alors qu'à l'extérieur, cet auteur assumait et signait chaque mot tombé de sa plume, John Watson, lui, est entré dans la fiction pour ne jamais en ressortir. C'est le ruban de Möbius... Pourquoi ce romancier a-t-il utilisé ce procédé ? Quel était son but ?

- Holmes, c'est impossible. J'ai parfaitement conscience de ce que j'ai vécu, pensé, fait et écrit.

- Je n'en doute pas, mon cher ami. Mais avez vous le plus petit souvenir d'un fait qui aurait existé en dehors de la somme des aventures que vous pensez avoir consigné ? Ne sentez-vous pas le voile qui vous sépare du monde des vivants ? N'y voyez là aucun mal, aucun défaut, ni aucune insuffisance. John, vous êtes une créature livresque, une figure de l'imagination, vous n'existez que dans la jointure des mots.

- Incroyable. Toutes ces années, je les aurais passées niché à l'intérieur d'un opus romanesque ?

- Vous avez été le double, dans le roman, d'un homme avisé, ou alors... lui-même joué. En vous délégant dans son oeuvre, l'écrivain a réussi un exploit : comme les grecs en Troie, cachés dans la statue du cheval, son esprit est entré, par effraction, dans le domaine réservé de la fiction. Et là, cher John, vous m'avez rencontré. J'étais déjà dans la place. Je vous attendais. Et dans le captivant repli où s'élabore la pensée du monde, nous avons agit... Les récits, dont il vous a attribué la paternité, ont été traduits en toutes langues. Ces petits joyaux d'ingéniosité narrative ont établi, avec force, qu'existait une méthode efficace permettant l'élucidation de toute ténébreuse affaire.

- Cela dépasse l'entendement! Comment diable pouvez-vous savoir tout ce que vous dites, Holmes ?

- Approchez-vous de la fenêtre, Watson. Un simple regard sur le cadran du temps renseigne : l'aiguille n'indique plus la même heure. L'inexorable évolution a changé le visage de tout ce que notre premier auteur a connu. Ses intuitions, ses perceptions, ses idées, ses convictions, étaient strictement tributaires de son époque. Elle est révolue.

En piste, en piste ! Aujourd'hui, quelqu'un nous réengage. Ensemble, dans la langue française, nous reprenons du service. Car une puissante énigme subsiste que notre précédent auteur n'a pas résolu. Je résidais dans la structure fictionnelle. J'étais déjà dans le palais de l'imaginaire. Depuis une fenêtre, je vous ai vu traverser le jardin, approcher du péristyle. Vous avez franchi le seuil et dans le hall de l'imagination, en levant les yeux, vous avez aperçu ma haute silhouette. Mais qui suis-je ? Qui avez-vous rencontré ? Qui est le dénommé Sherlock Holmes ?

mardi 27 février 2007

26. In the sky, rainbow's arch!

Hier.
26 du mois de février. An de grâce, 2007. Normandie. Eure.
Dans l'après-midi, 17 heures, heure française. 21 heures 30, heure madrassienne.

Les deux pieds d'un gigantesque arc en ciel se sont posés sur la campagne normande. Toutes les couleurs étaient visibles. La pigmentation violette était particulièrement intense. Comme si le Peintre des nuées disait : voici le portique de l'amitié que je pose en plein ciel. Un pied est ici, l'autre en Inde. Je donne toutes les couleurs à tous. Mais vois, la teinte violette, si profonde, est réservée à l'action de ce jour : vrombissant à 10 000 mètres d'altitude, soudain, un avion est apparu. Instantanément, cher lecteur, j'ai pensé à toi. Mes yeux se sont embrumés de larmes. Vue d'un certain angle, la petite atmosphère qui entoure mes globes oculaires, a dû, elle-aussi, projeter un arc-en-ciel.

Le 27, ce matin. 9h25. 13h55, là où tu me lis.

Un message de toi! Quelle joie! A haute voix, je l'ai lu à toute la maisonnée. Grâce à tes mots, nous t'avons tous très bien visualisé, marchant au milieu de cette Inde t'arrivant d'un coup, par ses odeurs et ses bruits. Et ce taxi! Un chauffeur nous emmène à notre logement, zigzaguant comme un fou sur la
route, klaxonnant sans arrêt, musique bollywoodienne à fond à l'arrière. J'ai le sentiment, qu'à lui seul, ce conducteur, a été le faire part de bienvenu, le welcome to India, que l'immense pays t'a envoyé. Nous embrassons tous très fort le Voyageur dont nous sommes heureux et fiers d'être les amis.

vendredi 23 février 2007

23

Bonjour à toi, cher visiteur ! Sois le bienvenu sur ce blog.

Rainbow's Arch a de la veine. Il apparait dans le ciel du web un 23. J'ai beaucoup d'affection pour ce nombre. Je sais pourquoi. Sans l'ombre d'une malédiction, gentiment, il accompagne ma vie depuis ma naissance. Il est présent dans le nom de la rue où se trouve ma maison natale. Toutes les fois où j'ai désiré qu'une personne m'écrive, en donnant mon adresse, j'ai dû prononcer son nom.

Pendant 23 ans, j'ai reçu lettres et colis, où le nombre XXIII était auprès de mon nom. Afin que les envois, le cas échéant, me reviennent et ne se perdent pas, des centaines de fois, au dos de mes lettres, j'ai écrit et réécrit ce chiffre de Vingt-Trois. Il s'écrit, se dessine. Il se voit. Tu peux aussi le prononcer, cher visiteur, en langue française ou anglaise et l'écouter vibrer dans l'air, autour de toi : 23. Sa mélodie est souvent négligée, parfois oubliée.

C'est une ancienne et mystérieuse sonate. Sa structure est fascinante, envoûtante, comme si une entité vivait dedans. Un jour, une femme m'en a donné le secret. 23 n'est pas seulement un nombre. C'est aussi une Lettre alphabétique. Tout un roman.



Dear visitor, good evening! Be welcome on this blog.

Rainbow's arch is quite fortunate. It appears over the web's sky on a 23rd. I am very fond of this number. I know why. Without the faintest of maledictions, since my birth it gently accompanies my life. It is present in my childhood house's street name. Everytime I wished for someone to write me I had to pronounce its name when giving my adress.

During 23 years I received letters and parcels on which the number 23 lied just above my name. Hundreds of times I wrote and rewrote it on the back of my letters, so they would not risk getting lost. It can be written or drawn. It can be seen. You can also pronounce it, dear visitor, in French or in English, and listen to its vibration in the air, surrounding you: 23. Its melody is often neglected, sometimes forgotten.

It is an ancient and mysterious sonata. Its structure is facinating, even bewitching, as if a living entity lied inside. One day a woman game me its secret. Not only is 23 a number. It is also an alphabetical Letter. A whole novel.